Communiqué de presse

Développement durable : l’ONU tire la sonnette d’alarme à cinq ans de l’échéance

14 juillet 2025

  • Une décennie après leur adoption, les objectifs mondiaux censés transformer la planète sont à la traîne. Depuis New York, les Nations Unies appellent à une mobilisation urgente pour éviter l’échec collectif.
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Alors que l’Agenda 2030 entre dans sa dernière ligne droite et que les objectifs de développement durable sont loin d’être atteints, l’organisation tente de raviver l’élan international. Lundi, un forum politique de haut niveau s’est ouvert pour deux semaines au siège de l’ONU afin de faire le point sur les progrès accomplis depuis l’adoption de ces objectifs en 2015. 

Quelques heures après l’ouverture du forum, le Secrétaire général, António Guterres, a dévoilé un nouveau rapport d’étape qui guidera les travaux des délégations. L’étude dresse un constat sans appel quant aux retards accumulés.

« Nous faisons face à une véritable urgence mondiale en matière de développement », a averti M. Guterres lors d’une conférence de presse, en compagnie la Vice-Secrétaire générale, Amina Mohammed, et du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, Li Junhua. 

Sur les 17 objectifs fixés, un peu plus d’un tiers à peine sont aujourd’hui en bonne voie ou progressent modérément. Près de la moitié stagnent, et 18 % ont même régressé. Le monde, autrement dit, n’avance ni assez vite, ni dans la bonne direction.

Progrès indéniables, mais inégaux

Le nouveau rapport n’est pas uniquement pessimiste. Il dresse aussi le bilan de plusieurs avancées significatives : le taux d’accès à l’électricité atteint désormais 92 % à l’échelle mondiale. Le recul du mariage des enfants se poursuit. Davantage de filles sont scolarisées, et plus de la moitié de la population mondiale bénéficie désormais d'une protection sociale. L’essor du numérique, avec un accès mondial à Internet passé de 40 % à 68 % depuis 2015, a permis à des millions de personnes d’accéder à l’emploi.

Depuis 2015, 110 millions d’enfants et de jeunes supplémentaires ont été scolarisés, et 54 pays ont éliminé au moins une maladie tropicale négligée. « Ces progrès démontrent qu’investir dans le développement et l’inclusion porte ses fruits », a souligné le Secrétaire général.

La Vice-Secrétaire générale, Mme Mohammed, a souligné que « davantage de mères survivent à l’accouchement, davantage d’enfants franchissent le cap de leur cinquième anniversaire, et l’accès à l’éducation s’élargit, y compris dans les filières scientifiques pour les filles ». Elle a également salué les investissements dans les énergies renouvelables, essentielles pour « atteindre les plus éloignés ».

Mais ces résultats positifs ne doivent pas masquer la réalité de la pauvreté persistante, des inégalités croissantes et de la crise climatique. En 2024, l’année la plus chaude jamais enregistrée, plus de 800 millions de personnes vivaient encore dans l’extrême pauvreté. Près de 38 millions étaient réfugiées, et 1,12 milliard d’habitants résidaient dans des bidonvilles privés de services de base. Des milliards de personnes n’ont toujours pas accès à l’eau potable. Le montant de la dette des pays pauvres à revenu intermédiaire a atteint un niveau record de 1.400 milliards de dollars en 2023.

Un forum pour raviver les engagements

« Nous sommes réunis ici non seulement pour évaluer les progrès, mais pour raviver notre engagement commun », a déclaré Lok Bahadur Thapa, vice-président du Conseil économique et social de l’ONU, à l’ouverture du forum. 

Au total, a-t-il rappelé, 4.000 milliards de dollars manquent chaque année pour atteindre les objectifs de développement durable.

Organisé sous le thème « Promouvoir des solutions durables, inclusives, fondées sur la science et les données factuelles », le forum examinera en détail cinq objectifs de développement durable : santé, égalité entre les sexes, travail décent, protection des océans, et partenariats mondiaux. 

Du 14 au 23 juillet, les discussions s’appuieront sur plusieurs rapports clés, notamment celui présenté par le Secrétaire général, ainsi que sur les bilans de mise en œuvre des objectifs présentés par 37 pays sous la forme d’« examens nationaux volontaires ».

Amina Mohammed a souligné que ces examens, menés dans près de 190 pays depuis 2016, « sont devenus un exercice universel, un signe encourageant de l’appropriation nationale des objectifs de développement durable ».

Une feuille de route en six chantiers

Pour tenter de redresser la trajectoire, le rapport publié lundi identifie six domaines où davantage d’efforts peuvent produire des effets systémiques : les systèmes alimentaires, l’énergie, le numérique, l’éducation, l’emploi et l’action climatique. « Des transformations structurelles […] constituent notre feuille de route », a fait valoir M. Guterres. « Des progrès dans un domaine peuvent en accélérer d’autres ».

Mais ces transformations nécessitent une condition préalable : un financement massif. « Sans financement à grande échelle, aucun progrès n’est possible », a martelé le Secrétaire général. Il a salué à ce titre l’Engagement de Séville, adopté début juillet dans la ville espagnole lors de la quatrième Conférence sur le financement du développement. Ce texte prévoit notamment la réforme de l’architecture financière internationale, des allègements de dette, et un triplement de la capacité de prêt des banques multilatérales.

La paix, moteur du développement

Les objectifs sont aussi freinés par les conflits, que M. Guterres a longuement évoqués. Il a appelé à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, et à un accès humanitaire sans entrave comme première étape vers une solution à deux États. Il a aussi insisté sur la nécessité de consolider la trêve entre Israël et l’Iran, de parvenir à « une paix juste et durable en Ukraine », et de mettre fin « à l’horreur et aux effusions de sang » au Soudan.

« De la République démocratique du Congo à la Somalie, du Sahel à la Birmanie, nous savons que la paix durable passe par le développement durable », a-t-il insisté.

Cinq ans pour tenir promesse

En filigrane du forum se profile une question fondamentale : l’Agenda 2030 est-il encore réalisable ? Pour l’ONU, la réponse est oui, à condition de s’engager sans délai. « Ce n’est pas le moment de céder au découragement, mais de passer à l’action avec détermination », a lancé à cette occasion Li Junhua, du département onusien des affaires économiques et sociales. Il appelle à un « multilatéralisme d’urgence » fondé sur la responsabilité partagée et l’investissement collectif.

La route est donc étroite, mais elle reste ouverte. « Les objectifs de développement durable sont encore à portée de main », a conclu António Guterres. « Mais seulement si nous agissons – avec urgence, unité et détermination ».

Entités des Nations Unies impliquées dans cette initiative

ONU
Nations Unies

Objectifs poursuivis à travers cette initiative